LE CYCLOPE

Fragments de liesse

Jour de carnaval dans une petite ville

du centre de la France. Des rues grouillantes et métissées, des mouvements violents, des jeux moqueurs viennent défier le vide ambiant habituel. Pour quelques heures, on ôte le masque de son quotidien. On bouscule l’ordre établi en laissant le corps exulter. Le rituel est contestataire et salvateur. Un bras d’honneur de la vie, à l’ordre et à la mort.

 

Encore faut-il pouvoir dénouer ce désordre apparent pour le donner à lire. D’instinct, découper la réalité en tranches. Surtout ne pas hésiter à hacher corps et visages sur les bords du cadre, happer la vie au grand angle pour rattraper la vie hors champ. L’éclair du flash découpe à cru des espaces obscurs. Il est, certes, plus facile d’avoir la pupille dilatée par l’exotisme d’un ailleurs lointain, que de ramener une moisson d’images du coin de sa rue. Glisser dans la foule, épouser ses contorsions, avancer toujours plus près du sujet à capturer. Terrible proximité.

Il y a un moment où l’on devient trop évident, trop présent, pour être gênant.

 

Le clic et le clac du rideau qui se ferme : c’est physique et culturel. Une décharge d’énergie, où l’on saisit ce que seul l’inconscient peut voir. Et tout ça, pourquoi ? Pour essayer d’apprivoiser une grammaire du chaotique, le temps d’un clignement de paupière. Écrire une histoire de signes qui s’entrechoquent, autour de portraits dont la dimension psychologique, finalement, importe moins que celle de révélateur d’une situation codée. Enfin, confronter ces puzzles de visages dont les détails nous content des sociétés entières. Regarder, c’est agir !

 

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